Femmes, hommes, terrorisme

La « religiosité  » alimente une violence spécifique dont il convient de bien observer les racines et la nature. Ces racines sont ancestrales, et de ce fait elles ont ancré dans l’inconscient collectif, non pas des convictions mais des crédulités.

Alors que les convictions religieuses se forgent en acceptant la complexité des situations et les modifications imposées par l’évolution des modèles sociétaux, la crédulité se nourrit d’émotions, de rites intangibles, de décrets ancestraux et, de préférence, « sacralisés » pour les rendre plus contraignants.

La peur originelle d’un dieu-qui-punit et la peur de la femme-qui-porte-la-vie se sont conjuguées pour terrifier la masculinité, en Occident comme ailleurs, et lui faire adopter un système de défense qui perdure encore actuellement, sous la forme d’une théocratie patriarcale.

Quoi de plus « efficace » que de se faire représenter par une force divine pour asseoir son autorité, faire taire la potentielle force du féminin, privilégier la puissance masculine ?

C’est bien pourquoi, à l’heure de la mondialisation, l’ancestral dans l’humanité explose (hélas dans tous les sens du terme) en terrorisme et ce n’est pas par hasard que se développe, autour de la place grandissante de la femme et en référence à la sexualité, un retour à la guerre sainte en lien avec… la chevelure féminine.

Double symbole d’intimité et de vitalité, cette chevelure, en effet, fait peur : la sensualité qu’elle représente renvoie à l’emprise du plaisir sexuel dont l’homme doit être l’initiateur… et le seul bénéficiaire.

À lui, l’homme, le droit à l’impudeur – à elle, la femme, le devoir de pudeur.

À lui, le droit de dominer – à elle, le devoir d’être désinformée, pour être soumise et, de cette manière, désirable et honorable.

À lui de trier entre les courtisanes et les femmes légitimes – entre les prostituées et les femmes vertueuses.

À lui de les maintenir toutes dans l’ignorance et de les obliger à transmettre à leurs fils le goût de la domination dont elles sont les premières victimes.

Avec l’essor de l’émancipation féminine dont le processus s’avère irréversible, c’est bien l’accès au savoir et au plaisir, pour un sexe comme pour l’autre, qui délimite en réalité un nouvel espace géopolitique et les prétendues frontières actuelles entre l’Occident et le reste du monde.

C’est pourquoi, avant de parler de morale, il faut s’accorder sur le fondement de la liberté de tout être humain : il ne s’agit pas seulement d’affranchir, mais de reconnaître intégralement le droit d’exister par soi-même.

Ce droit peut alors s’accompagner de devoir, et la femme n’a pas plus le droit d’aliéner l’homme qu’il n’a le droit d’aliéner la femme.

C’est ensemble qu’ils doivent mettre en œuvre les conditions du respect de l’un et de l’autre, et admettre que ce respect transcende le désir de chacun.

Il se peut que cette transcendance soit nommée Dieu, et c’est un choix de couple, mais le fait que cette transcendance ne soit pas perçue ainsi n’empêche pas l’obligation pour la conscience de choisir le respect comme valeur universelle.

L’être humain doit sans doute apprendre, sans violence ni grandiloquence, à acquiescer à sa propre dignité et à sa propre grandeur, pour ne pas invoquer un dieu de pacotille, terrifiant et misogyne, qui cautionnerait la haine, l’esclavage, et l’appel au meurtre.

. Dans ce sens, toute religion se doit d’éduquer à l’humanisme, si elle ne veut pas se dégrader en secte ou en idéologie meurtrière.

. Dans ce sens, toutes les religions devraient se donner pour mission, et c’est urgent, de se détacher de la volonté de puissance et de la guerre d’influence qui les opposent – permettant à une éthique universelle de se développer, en dehors d’un retour rigide au moralisme et à une religiosité infantilisante.

Dans ce sens,
. à distance égale de la cruelle pudibonderie qui emprisonne le visage de la femme et de l’obscène pornographie qui l’annule,
. à distance égale d’un féminisme provocateur/castrateur et d’un masculinisme revendicatif/brutal,

toutes les religions devraient œuvrer à une réconciliation de l’homme et de la femme, en présentant la sexualité comme un vecteur d’amitié et non comme un rapport de force.

. Dans ce sens, travaillant avec ceux qui croient au ciel et ceux qui n’y croient pas, les religions pourraient être les garantes de toutes les abolitions – de l’esclavage – de la peine de mort – de la torture, elles pourraient conduire vers plus de Compassion, de Bonté, de Clémence en se référant définitivement à l’impérative et catégorique injonction : Tu ne tueras pas.

M.P. Oudin