Messages politiques, messages religieux : complicité mortifère ou synergie fructueuse ?

La laïcité « à la française » a officialisé la séparation du pouvoir politique et du pouvoir religieux, de l’État et des Églises. Il en a résulté, et c’est heureux, une réflexion, de part et d’autre, sur la liberté de conscience et ses corollaires : la liberté d’expression et la liberté des cultes, et aussi l’interdiction de signes « ostentatoires » d’appartenance religieuse, et particulièrement à l’école au sens large.

C’est donc pour endiguer une lutte de pouvoir qu’a été adoptée la loi de 1905. En filigrane – et c’est là le dessein salutaire de cette loi – il s’agit de lutter contre toute forme de théocratie. Ce n’est donc pas forcément la « religion » en soi qui est visée mais l’instrumentalisation d’un Dieu Tout Puissant devenant gestionnaire de la société civile et la privant de tout esprit critique.

Dès lors, il est indispensable de distinguer dans le religieux ce qui est mortifère et ce qui est libérateur : le théologien et le législateur sont invités à débattre ensemble et en profondeur de ce qui est réellement en cause et qui conduit, encore actuellement, au despotisme ou à l’inquisition.
On connaît la phrase attribuée à Voltaire : Si Dieu nous a fait à son image, nous le lui avons bien rendu et, en effet, l’incroyant et le croyant ont le devoir de s’interroger sur une volonté de puissance strictement humaine susceptible de mener à l’idolâtrie d’un ego surdimensionné à l’aune d’un divin fantasmé.

Cet ego est pourtant peu glorieux : il est avide de conquête et de reconquête, de domination (qu’elle soit masculine ou féminine) et finalement avant tout désireux de célébrer les résultats de sa propre intelligence, quitte à se perdre dans le labyrinthe de l’Intelligence Artificielle dont il n’a plus la maîtrise.

Le Covid, les guerres en Ukraine et ailleurs, le dérèglement climatique… ont de quoi nous remettre les pieds sur terre et nous indiquer la voie de la sagesse. C’est en abandonnant les rives de la violence politique et de la violence religieuse, qui appellent toutes deux au meurtre, que nous pourrons faire converger, en une synergie fructueuse, la parole de la démocratie et la parole de la spiritualité :
. le respect du droit et la droiture de la conscience,
. la justice et la fraternité,
. les droits de l’homme et l’hospitalité,
. le souci de l’environnement et la contemplation de la nature.

Hors de ces exigences vraiment radicales, il n’y a pas pour l’être humain d’échappatoire s’il ne veut pas sombrer dans la barbarie et le mensonge qui en est le terreau.

Osons espérer et croire que, s’Il existe, et quelle que soit son appellation dans les différentes religions, Dieu n’est pas le complice de l’obscurantisme et de la démesure.

Marie-Pierre Oudin