En ce début d’année 2025, durant laquelle il sera question de négocier des Traités de paix pour tenter de mettre fin aux conflits qui mettent en péril l’équilibre du monde, il est indispensable de reconsidérer les conditions d’une paix durable.
Bertrand Badie nous y aide grandement avec son livre : L’Art de la paix.
Les 9 chapitres qui le composent nous entraînent, crescendo, vers la compréhension d’une paix globale.
Avant tout, il s’agit de remettre la paix à l’endroit en la sortant des ornières qui la réduisent à n’être qu’une non-guerre sous les apparences de traités, dits de paix, humiliants et fatalement provisoires. En effet, le triomphalisme des vainqueurs suscite chez les vaincus une détermination à prendre, tôt ou tard, leur revanche, quand ce n’est pas le vainqueur qui en profite pour préparer sa prochaine agression.
Pour éviter cela, il faut extirper la paix du Pouvoir – celui des princes mais aussi celui, inconscient, qui anime trop souvent les organismes internationaux pourtant voués à sa cause.
Hors d’un quelconque pouvoir, la paix retrouve son visage initial : celui d’une force de fédération, de coopération, y compris avec l’ex-ennemi.
Une diplomatie repensée dans ce sens, et donc renouvelée, sera infiniment féconde : de proche en proche, ce renouvellement des méthodes diplomatiques, cet Art de la paix, éveillera progressivement une responsabilisation collective.
La paix, en quelque sorte confisquée par les Puissants, redevient puissance de persuasion dans les mains de toutes celles et ceux qui œuvrent à la solidarité, le respect, l’humanisme, l’universalisme.
Phantasme, lorsqu’elle n’est qu’une trêve dans la suite des guerres, la paix retrouve toute sa réalité dans les actions concrètes qui tissent les liens durables de la fraternité. Elle devient alors fondatrice.
Aristote et sa conception d’une amitié utilitaire, Kant et sa vision d’une hospitalité universelle, Victor Hugo et son appel à une sympathie des âmes viennent jalonner, parmi d’autres nombreux invités (sociologues, juristes, humanitaires, humanistes etc.), le parcours de la réflexion constructive de Bertrand Badie.
Elle nous pousse à agir partout et à tous les niveaux de décision, pour donner corps à la paix, pour la sortir de sa persistante et stérile cohabitation forcée avec la guerre, pour en faire l’essentiel ferment de nos raisons d’espérer et la rendre globale.
Dans un monde globalisé, le rapport entretenu par chaque humain avec son semblable devient décisif, faisant de chacun un atome de la paix.
Porteurs de cette conviction nous pouvons en effet parier sur la paix.
Dès lors, on ne peut que remercier l’auteur de L’Art de la paix et recommander la lecture de son livre.
Marie-Pierre Oudin
Bertrand Badie : L’Art de la paix – Flammarion (2024)